Certitude ou improvisation?

Comme êtres humains, nous sommes des créatures qui cherchons la survie de notre espèce. La grotte, comme désormais les bâtiments, ont toujours été notre tanière, la maison où nous réfugier et vivre avec nos semblables, notre famille, c’est-à-dire le groupe de référence qui nous donne sécurité et force. C’est un besoin que nous exprimons en tant qu’êtres sociaux.

Dans l’antiquité, la plupart des personnes habitaient en communauté: dans des petits villages, après en villes entre des murs, dans des villages plus grands, dans des colonies manufacturières, et plus tard dans des grandes villes. Dans ces regroupements de gens on a toujours eu des besoins, des aspirations communes: bien manger tous les jours, des vêtements pour ne pas avoir froid, jouir d’une bonne santé, etc. Et pour obtenir tout cela, on a créé la base de l’argent comme monnaie de payement des choses qui nous sont nécessaires.

Avec le temps et l’amélioration de la qualité de vie, les besoins de culture (au niveau intellectuel), d’une meilleure éducation, du luxe, ou de loisir ont été ajoutés. Mais l’argent, au début un simple outil d’échange, a pris de plus en plus d’importance jusqu’à devenir une fin en soi qui centralise la société moderne, et qui nous attache à des aspirations socialement acceptées.

L’idée de suivre un parcours professionnel conventionnel, faire des études afin d’accéder à un bon emploi, acheter un appartement (ou le louer, le choix « maison » on ne la considère plus vraiment aujourd’hui), trouver un partenaire avec qui partager notre vie, peut-être se marier (ici on commence avec les « accessoires »), avoir de la descendance, pour certains même arriver à la seconde résidence pour les vacances… et comme ça faire petit à petit le pack « vie parfaite » ou couramment accepté comme tel. Pour un nombre non négligeable de personnes tout ce qu’on définit comme le choix « traditionnel » reste encore très attirant. Et sans prétendre le banaliser, ces aspirations comblent les attentes de la majorité et apportent un scénario de stabilité indubitable.

Cet choix « traditionnelle » est donc un point de repère à partir duquel on peut être en confiance, qui permet aux individus de se réaliser, d’arriver a ça qu’on appelle la bonheur -à fois sacralisée- et pouvoir le mesurer avec ce qu’on a ou ce qu’on a réussi à faire. La question est-elle d’avoir des buts réels, clairs, et parfois même socialement acceptés? Mais acceptés pourquoi et par qui? C’est une perspective d’une société concrète, même si on ne cesse pas de la généraliser comme s’il s’agissait du vrai choix. On appelle ça « argumentum ad populum », c’est-à-dire la figure de rhétorique qui se sert du pouvoir du peuple pour approuver la raison de la majorité. Ce qui fait qu’on peut aussi se poser la question de proposer et accepter d’autres alternatives, n’est-ce pas?

Soit comme les touareg ou à d’autres époques les gitans ou d’autres tribus nomades, soit comme des actuels discours individualistes qui revendiquent le libre arbitre et la satisfaction des ses propres besoins, on pourrait penser qu’il y a une sorte de démystification des perspectives classiques des personnes, de la vie sédentaire et une recherche de l’hédonisme postmoderne.

De plus en plus on trouve des insatisfaits non-conformistes et parfois un peu fous qui s’écartent du mode de vie préconçu. Par exemple, travailler justement pour vivre, en faisant quelque chose avec laquelle on ne souffre pas de stress mais qui ne soir pas non plus désagréable ni très similaire à ce qu’on aimerait bien faire (on ne va pas appeler ça du travail, alors!). Gagner peu ou plutôt de manière suffisant avec des projets éventuels, être free-lance ou même un nomade digital, en gardant une liberté de mouvement et flexibilité plus adressée à notre vie et non aux exigences de notre métier. La maison ne serait pas fixe, donc voyager, improviser et s’adapter deviendront nos verbes. Nouvelles situations, profiter de qui nous arrive, laisser ce qui ne nous intéresse pas. Il y aurait lieu aussi pour des relations sociales et personnelles, mais pas avec les normes et les perspectives habituelles. L’adaptation, la multi culturalité avant de l’appartenance, la non-certitude, le mutable de cette forme de vie demande des esprits autant malléables que spontanées.

Mais cet autre choix n’est pas si évident. Il y a des hésitations pour aller à contre-courant : la peur de l’incertitude, la peur de ne pas savoir comment serait notre comportement devant des situations imprévisibles et inconnues, de ne pas être comme les autres, de perdre nos racines, et aussi des problèmes pratiques. Par exemple, les enfants pourraient-ils vivre dans unes telle anarchie? Et pourquoi pas. On ne dit pas que le système traditionnel ne va pas bien, ni qu’il n’est pas valable, mais on se surprendrait de voir combien les enfants précisément ont une capacité pour s’adapter à diverses situations, contextes et surtout cultures et modes de vie différents avant nous, les adultes. Dès qu’on est petit on apprend des milliards de comportements, ce qui est « bon » ou « mauvaise », ce qui nous convient, ce que vouloir ou ce dont nous éloigner. Mais comme dans toutes les cultures, on reproduit ce qu’on voit dans notre contexte, notre éducation, des influences de nos pères, y compris ses aspirations et ses frustrations.

En fait, on pourrait chercher plus loin et poser la question: est-ce qu’on parlerait de crises et des problèmes structuraux de la société si on était préparés pour s’adapter à de nouvelles situations au lieu d’essayer constamment de maintenir imperturbables nos positions et confort à tout prix? Des fois ce manque d’esprit ouvert paraît une sorte de récompense de la médiocrité.

Mais on ne parle pas de la radicalisation sauvage des attitudes. Il ne s’agit pas de faire un ou l’autre, mais de repenser notre style de vie, de surtout ne pas être ébloui par des objectifs vitaux et surtout sociaux qui nous rendent parfois malheureux à cause de notre difficulté à les attraper. Comprendre qu’on n’a pas le choix pour tout parait-il raisonnable, mais se laisser porter pour la fatalité et le manque de conscience c’est vraiment une autre chose.

Peut-être que tout ça c’est que du jeune idéalisme et après on va tous retourner pondre les œufs à la maison d’origine, comme es tortues. Mais il ne faudrait jamais perdre l’éclat de l’enfant rêveur que chacun a, au fond de lui.

A.V.

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